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Augmentation des provisions pour dépréciation avec l’IFRS 9

février 4, 2025

Robustes et fortement capitalisées, les banques locales ont su résister au choc au plus fort de la crise financière de 2007-2008. Aujourd’hui, alors qu’elles sont appelées à participer pleinement à la reprise économique, leur résilience est à nouveau mise à l’épreuve. Pour atténuer les risques, notamment ceux liés aux créances douteuses, elles peuvent s’appuyer sur la norme IFRS 9, qui les aide à gérer leurs risques.

Depuis le 1er janvier 2018, la norme IFRS 9 a changé la manière dont les entreprises doivent préparer leurs états financiers. Elles doivent désormais passer à un modèle de dépréciation du risque de crédit. Dans cette période post COVID-19 où les banques sont particulièrement vulnérables, comment la norme IFRS 9 peut-elle les aider à mieux provisionner les créances douteuses, notamment pour le segment B ?
Le COVID-19 a apporté une nouvelle série de défis avec une croissance négative, une baisse de la consommation, une augmentation du chômage et une hausse de l’inflation, entre autres. Ainsi, les variables utilisées dans le développement des modèles financiers ne sont plus valables en raison des nouveaux défis qui sont apparus et qui affectent le secteur bancaire dans son ensemble.

En ce qui concerne la norme IFRS 9, elle est principalement axée sur le traitement des données financières. Les modèles révisés de l’IFRS 9 tiennent en fait compte de l’augmentation significative du risque de crédit, qui accroît les probabilités de défaillance et se traduit par des provisions pour dépréciation plus élevées, tant pour le segment A que pour le segment B.

Peut-on dire que l’IFRS 9 est un outil précieux pour les services de contrôle interne ?
Le risque de crédit est l’un des risques les plus importants auxquels une banque est confrontée. La norme IFRS 9 propose une nouvelle méthode d’évaluation du niveau de risque et des provisions correspondantes qui doivent être comptabilisées. Ce que l’on peut dire, c’est que l’évaluation d’une proposition de crédit et la détermination du niveau approprié des provisions liées au risque de crédit requièrent invariablement un niveau élevé de jugement d’expert. La norme IFRS 9 exige toutefois que nous constituions des provisions dès le premier jour de décaissement d’un prêt. Le niveau des provisions dépend de divers facteurs, tels que le client, la nature de son activité, son comportement passé, tout en adoptant un point de vue prospectif qui, là encore, nécessite le recours au jugement d’un expert. Le niveau des provisions doit ensuite être régulièrement réévalué en fonction de l’évolution de l’environnement opérationnel.

Comment l’IFRS 9 peut-elle contribuer à renforcer la stabilité du système financier ?
L’IFRS 9 exige la modélisation des données financières. Si les modèles sont dotés d’un cadre approprié, testés et révisés régulièrement, ils contribueront sans aucun doute à la stabilité du système financier. Le défi actuel est que chaque banque a son propre modèle IFRS 9 qui reflète ses portefeuilles uniques, ce qui entraîne un manque de cohérence au sein de l’industrie. Par exemple, pour deux expositions similaires envers la même entreprise, deux banques différentes appliqueront des niveaux de provision différents et les montants peuvent parfois varier considérablement. Mais ce que nous avons constaté, en règle générale, c’est une augmentation globale des niveaux de provision.

En quoi l’IFRS 9 diffère-t-elle de l’IAS 39 ?
Le principal changement apporté par l’IFRS 9 par rapport à l’IAS 39 concerne la dépréciation des actifs financiers. L’IFRS 9 exige que des informations prospectives soient utilisées pour calculer le niveau approprié des provisions à constituer pour un actif. L’échelonnement est également un nouveau concept qui permet de calculer les pertes attendues sur 12 mois et sur toute la durée du prêt. Les autres changements introduits sont moins importants.

Pensez-vous que les normes d’information financière étaient autrefois trop complexes ?
Les normes d’information financière deviennent de plus en plus exigeantes et complexes. Comme les lecteurs des états financiers sont aujourd’hui bien informés et sophistiqués, les rapports annuels doivent contenir de plus en plus d’informations qui sont utilisées pour une analyse plus approfondie. En conséquence, l’amélioration des rapports permet une plus grande transparence et les comparaisons deviennent beaucoup plus significatives.

La nouvelle norme a eu un impact sur les opérations financières des banques. Mais avec le recul, ne pensez-vous pas que cette transition était nécessaire, surtout à un moment où les banques doivent être plus rigoureuses sur les risques de crédit ?
La norme IFRS 9 a été proposée à la suite de la mauvaise expérience de la crise financière de 2007/2008, lorsqu’il est apparu que les dispositions de la norme IAS 39 ne reflétaient pas réellement le risque de crédit figurant dans les bilans des banques. La pertinence de l’IAS 39 étant devenue douteuse, il était absolument nécessaire de passer à un nouveau cadre. Le passage de l’IAS 39 à l’IFRS 9 a entraîné une augmentation globale des provisions pour dépréciation dans le monde entier, y compris à Maurice. L’augmentation des niveaux de provision permet de mieux amortir les périodes difficiles, ce qui est bénéfique pour l’ensemble du secteur.

Ranjeeve Gowreesunkur
Directeur financier de Bank One

Business Magazine, 19 août 2020